Architecture
Lorsque le promeneur visite une forteresse, il découvre un ensemble de murailles, de bâtiments, d’équipements. Pour bien la connaître, il doit l’approcher, puis l’investir progressivement de la première porte jusqu’au donjon.
Les mots gras marqués d’un astérisque (*) sont définis dans le glossaire.
Le château fort vu de loin
Au Moyen Age, le château fort est la résidence fortifiée, permanente ou intermittente, d’un seigneur. Il est équipé d’un système défensif plus ou moins élaboré : la barbacane*, les tours* (dont le donjon*), les murs d’enceinte*; le fossé*; le pont-levis*; les hourds*; le parapet* avec ses créneaux* et ses merlons*. Il peut également abriter, notamment en temps de guerre, les sujets du seigneur.
La motte
Le château peut être construit sur motte*. Dans ce cas, il s’agit d’un tertre de terre partiellement ou totalement artificiel. La motte accueille une tour, le donjon*-habitation en bois ou en pierres, résidence du seigneur. La motte est entourée d’un rempart de terre surmonté d’une palanque*, palissade faite de gros pieux plantés verticalement côte à côte.
La citadelle
Parfois, le château peut défendre ou commander une cité. Il fait alors partie du système des remparts urbains. Dans ce cas, il est appelé citadelle*.
Parlons du constructeur
Pour se défendre, pour assister ceux envers lesquels ils ont des devoirs, pour protéger leurs propres intérêts, les suzerains (au premier chef l’empereur et les rois, puis les autres puissants seigneurs), leurs vassaux et leurs avoués bâtissent des forteresses appelées châteaux ou châteaux forts.
Alleu et fief
Le château est souvent érigé sur un alleu*, c’est-à-dire une terre de libre propriété ne dépendant d’aucun autre seigneur que celui qui en est le maître. Il peut aussi voir le jour sur un fief*, c’est-à-dire la terre qu’un seigneur remet à un vassal*. Le seigneur donateur, ou suzerain*, reçoit en échange des services militaires, administratifs ou économiques. Quant au vassal, il rend hommage à son suzerain pour le fief. Le vassal devient ainsi le lige (ou l’homme lige) de son suzerain. Le vassal peut lui-même être un seigneur situé à un échelon important de la pyramide féodale.
Ministériel et avoué
Il peut aussi être ministériel*, c’est-à-dire un homme libre (qui n’est pas serf ou esclave) ou un chevalier chargé d’un rôle administratif ou militaire. Le ministériel est une sorte de fonctionnaire seigneurial. Le vassal doit aussi être fidèle au suzerain. Les liens de vassalité entraînent des droits et des devoirs de la part du vassal vis-à-vis du suzerain et de la part du suzerain vis-à-vis du vassal. Parfois, le seigneur mandate un autre seigneur (un noble de haut rang ou un chevalier, voire un homme libre) pour la défense de ses intérêts économiques, militaires, politiques ou religieux. Ce seigneur est nommé avoué (du latin advocatus qui a aussi donné le mot avocat, ainsi que le terme allemand « Vogt ». La mission ou la charge de ce protecteur est nommée avouerie*.
La construction du château
Après avoir choisi le terrain de construction et réuni le financement, le seigneur peut faire ouvrir le chantier sous la direction d’architectes et de professionnels du bâtiment. Ceux-ci sont les mêmes qui bâtissent les cathédrales, les églises, les remparts et les portes des villes.
Le bois nécessaire à la construction est pris sur place ou à proximité immédiate afin de dégager le site. Les futurs fossés* servent généralement de carrière et fournissent le matériau nécessaire à l’élévation des murailles. La durée du chantier est variable. Certains châteaux sont construits en peu d’années alors que d’autres n’ont jamais été achevés. Les carriers, puis les tailleurs de pierre préparent les pierres. En fonction du terrain géologique et de la richesse du maître d’ouvrage (le seigneur qui finance le chantier) la taille est plus ou moins soignée et l’érection de la forteresse menée avec plus ou moins de soin. Les bâtisseurs, au fait de l’art d’assiéger un château, étudient le plan pour contrer les risques de sape* ultérieure et opposer à l’attaquant de solides murailles.
Appareil
Pour créer de solides murailles, les tailleurs de pierre soignent l’appareil* en taillant les moellons* ou les blocs de pierre brute et en les disposant pour créer un parement. L’appareil peut être régulier (les pierres sont posées en assises égales en hauteur) ou irrégulier (les pierres s’imbriquent les unes dans les autres). Selon les dimensions des pierres, on dit grand appareil* (assemblage de pierres de taille de grande dimension, soigneusement préparées et dressées en assises de même hauteur et placées souvent à joints vifs, sans ciment); moyen appareil* (assemblage avec des pierres de taille moyenne); petit appareil* (assemblage de moellons* pris dans des couches de ciment).
Lorsque la taille est terminée, l’ouvrier signe parfois la pierre par un symbole appelé marque de tâcheron*. Ce signe lapidaire distinctif lui permet d’être rémunéré.
Parement et bosses
Les maçons, qui prennent le relais des tailleurs de pierres, élèvent les murs en soignant particulièrement le parement*, la surface extérieure formée de pierres de taille. Dans le cas d’une muraille qui doit être solide (au rempart ou au donjon, par exemple), les maçons créent un parement du mur extérieur et un parement du mur intérieur. Entre ces deux parements ils déposent le matériau de blocage* constitué de débris de pierres, de moellons* et même de briques. On emploie aussi le terme de remplage* à la place de blocage quand on utilise du petit matériau mélangé à du mortier. Lorsque la pierre s’y prête, une de ses faces comporte une bosse* (ou un bossage). Les tailleurs laissent cette saillie dans un but soit défensif (dans ce cas le parement* est renforcé contre les projectiles, soit décoratif, soit encore économique, puisque l’une des faces de la pierre est théoriquement moins travaillée que les autres.
Pour renforcer les angles des murs ou des bâtiments, les bâtisseurs créent un chaînage* à l’aide de pierres de taille disposées de telle manière qu’elles relient les parties différentes de mur.
Treuil et échafaudage
En vue de monter les pierres au niveau de la construction et en fonction de l’avancement du chantier, les bâtisseurs les entaillent et y insèrent des pinces accrochées à une corde s’enroulant autour d’un treuil. Les entailles sont appelées trous de levage ou trous de louve en fonction du type de pinces utilisées.
Il existe également des échafaudages sur les chantiers médiévaux, comme en témoignent les trous de boulins* encore visibles sur certains murs. Une fois les murs en place, il reste à couvrir les bâtiments et à équiper le château.
Les abords du château fort
Les villages, les voies de passage, les rivières et les forêts ou toute autre forme de revenus seigneuriaux ne sont, d’ordinaire, jamais loin du château. Si c’est possible, le château est bâti dans un lieu difficilement accessible. Ce n’est pas pour rien que dans certain cas on parle de « nid d’aigle ». En plaine, il est conçu sur une motte* castrale* ou sur un terrain naturellement ou artificiellement séparé du relief environnant par un fossé ou une douve remplie d’eau.
Glacis et talus
Les environs du château sont dénudés de tous les arbres qui pourraient empêcher la défense du site. Le bois a été utilisé pour la construction et le chauffage lors du chantier. En outre, les abords et les accès de la forteresse doivent pouvoir être surveillés aisément. Le château est souvent précédé par un terrain en pente, naturel ou artificiel, appelé glacis*. Parfois, il existe un espace naturel ou même maçonné à forte inclinaison et qui possède plus de déclivité que le glacis, le talus*.
Fossé
Le glacis et le talus peuvent facilement être balayés par les projectiles des défenseurs et remplacent avantageusement le fossé*.
Sur un relief accidenté, aux endroits où le glacis est inexistant, le concepteur crée une excavation ou une tranchée longitudinale nommée fossé*, qui sépare le château du reste de la montagne ou du rocher. Le fossé, qui peut entourer complètement ou partiellement le château, fait souvent office.de carrière lors de la construction du château. Mais il peut aussi être naturel (une faille ou un effondrement de terrain). En plaine, le fossé peut être rempli d’eau. Dans ce cas, il est nommé douve*.Un château peut être équipé de plusieurs fossés concentriques.
Escarpes et contrescarpes
Le talus ou mur intérieur (côté muraille) d’un fossé entourant une forteresse est nommé escarpe*. Le mur extérieur du fossé placé vis-à-vis de l’escarpe se nomme donc logiquement contrescarpe*. Celle-ci est parfois maçonnée. Elle se situe d’office à l’opposé du rempart* et reste sous la surveillance du château. Elle peut être mitoyenne non seulement d’un glacis*, mais encore de lices* ou de cours* extérieures. Elle peut être équipée d’un chemin couvert, sorte de chemin de ronde* extérieur au château. Ce chemin couvert peut être protégé par le relief d’un glacis* qui fait office de couvrement*.
Redoute et barbacane
Dans les grands châteaux forts, le fossé peut être complété par un système de défense plus développé. Ainsi, pour protéger les abords du château, le défenseur érige au-delà du fossé une ou plusieurs redoutes*, sortes d’ouvrages avancés.
On peut classer la barbacane* parmi les redoutes. Cet ouvrage défensif avancé du château est, lui aussi, placé à l’extérieur de la forteresse, au-delà du fossé et en face d’une porte ou d’un pont. Il est souvent circulaire et commande généralement l’entrée principale de la forteresse.
Lorsque la barbacane est importante et puissamment fortifiée, elle est parfois qualifiée de châtelet*. Mais elle peut n’être composée que d’une palanque* ou d’une simple levée de terre.
Tout autour du château fort : les remparts
L’approche du château est dominée par l’ensemble des murailles* défensives, qualifié d’enceinte* ou de rempart*. L’enceinte est subdivisée en fronts* (les diverses parties supérieures et antérieures d’une muraille, comprises entre deux tours* principales ou deux angles importants). Lorsqu’un morceau d’enceinte est compris entre deux tours, il se nomme courtine*.La courtine forme soit un front, soit une tranche de front. Parfois, le défenseur pratique une galerie de circulation à l’intérieur d’une courtine. Cette galerie, nommée gaine*, est parfois bâtie en encorbellement* sur la partie intérieure du rempart.
Fruit et empattement
La face extérieure du rempart est souvent inclinée, alors que le mur intérieur reste toujours rigoureusement vertical, si bien que la muraille, plus épaisse à sa base, s’amincit en montant. Cette inclinaison se nomme fruit*. La base de l’enceinte extérieure ou même des diverses tours (voir plus loin) peut être complétée par un renforcement maçonné ou taillé dans le roc. Il s’agit de l’empattement* destiné à rendre la sape* plus difficile et à obtenir le ricochet des projectiles jetés du haut de la muraille.
Un empattement brisé, formant bec* et ressemblant à une proue de navire, se nomme éperon*.
Ce dernier est destiné à interdire l’attaque frontale ou à dévier les projectiles de l’assaillant.
Pour des raisons de solidité ou d’adaptation au terrain et parfois par nécessité tactique, le maître d’œuvre gratifie le rempart de ressauts*, ces saillies qui rompent l’alignement de la muraille.
Mâchicoulis et hourds
Le sommet du rempart (ou des tours) est équipé de mâchicoulis*: Ce système de défense, placé en encorbellement* et équipé d’ouvertures verticales, favorise le tir fichant, les objets jetés par les mâchicoulis pouvant rebondir sur l’empattement*.
En l’absence ou en complément des mâchicoulis, le défenseur peut ajouter des hourds* au sommet de ses murailles ou de ses tours. Ils consistent en galeries de circulation volante et de défense en bois. Elles sont amovibles (escamotables*) et supportées par des corbeaux*, des consoles* ou des solives, également en bois. Pour simplifier, on peut dire que les hourds sont en quelque sorte des mâchicoulis en bois.
Il existe aussi de faux mâchicoulis* créés pour l’ornementation ou pour tromper l’ennemi de loin.
Chemin de ronde
Mâchicoulis et hourds donnent sur l’extérieur de l’enceinte. Leur pendant défensif complémentaire est le chemin de ronde*. Cette voie aménagée en saillie à l’intérieur du rempart peut être couverte par un toit. Elle est destinée à la circulation des sentinelles.
Créneaux et merlons
Le chemin de ronde est souvent protégé par un parapet*, véritable mur de défense construit au sommet de l’enceinte, d’une courtine ou d’une tour. Lorsque ce muret est formé de créneaux* (intervalle ouvert entre deux merlons) et de merlons* (la maçonnerie pleine entre deux créneaux et servant d’abri aux défenseurs), on dit que le parapet est crénelé. Les merlons sont généralement percés d’une ou plusieurs meurtrières.
Bouclier, manteau et braies
Le rempart est rendu plus solide par diverses méthodes architecturales. On peut en renforcer l’épaisseur en vue de protéger un point faible, en général du côté de l’attaque. Le mur devient alors mur-bouclier*.
Dans certains cas, celui-ci joue un rôle plus important que le donjon* et peut même se substituer à lui. Le mur bouclier ne doit pas être confondu avec une chemise*, qui est une muraille indépendante. Celle-ci, également appelée manteau* (Mantel, en allemand), enveloppe et renforce un point faible ou stratégique du château, généralement un donjon. Une chemise peut s’enrouler concentriquement autour d’un donjon ou peut être composée de plusieurs courtines*. La chemise peut se trouver à un ou plusieurs mètres ou seulement à quelques dizaines de centimètres du donjon. Le mot manteau constitue la racine du verbe démanteler qui signifie détruire ou démonter une muraille pierre après pierre.
En complément à l’enceinte, le bâtisseur érige parfois des braies*. Ce mot signifie « culotte » en vieux français. Il s’agit d’une sorte de rempart bas, véritable ouvrage défensif érigé à l’extérieur du château pour protéger les fondations de la forteresse contre la sape. La braie peut être constituée d’une élévation en terre ou maçonnée. Il peut aussi s’agir d’un terre-plein avec un mur compris entre deux enceintes, en avant du haut château.
Une braie de moindre importance ou de possibilité défensive douteuse ou incomplète est nommée fausse braie*. Elle a parfois une vocation ornementale. Il peut aussi s’agir d’une palissade ou d’une tranchée (avec parapet* défendant le fossé) assez basse pour être masquée par le relief de la contrescarpe*.
Les tours
Pour défendre le cœur du château, les seuls murs ne suffisent pas. Ils doivent être complétés par des tours*. Ces édifices sont plus ou moins élevés selon leur destination. Les tours peuvent être carrées, rectangulaires, cylindriques, semi-cylindriques, ovales, triangulaires, polygonales ou avoir d’autres formes géométriques selon les besoins. Selon sa situation ou son rôle par rapport à l’enceinte ou au château, la tour peut être tour d’angle* lorsqu’elle est construite à l’angle d’une muraille ou d’un bâtiment, tour de flanquement* ou tour flanquante lorsque, placée contre l’enceinte entre deux angles morts, elle permet le tir croisé et la défense des fondations du rempart, tour de guet* ou guette* (ou guète), lorsque, érigée au sommet du donjon, elle a pour mission de surveiller l’approche du château.
Bastion
Les tours voient leur conception adaptée aux besoins. Ainsi, le bastion est un ouvrage en terre ou en maçonnerie placé à l’extérieur du rempart.
Il peut être considéré comme une sorte de tour de flanquement. Il est placé en saillie contre la courtine et permet le tir croisé. Les bastions se sont généralisés avec l’arrivée des armes à feu (à partir de la première moitié du 14ème siècle). Ils sont souvent plus massifs et surtout plus sophistiqués que les tours construites lors de la multiplication des châteaux de pierre. La gorge (partie communiquant avec la forteresse) des bastions peut être ouverte, fermée ou remparée. Le terme allemand de bastion est Bollwerk.
Les bastions peuvent être équipés d’un ou plusieurs cavaliers* en maçonnerie et placés à l’intérieur ou au-dessus du bastion. Ils augmentent la vue et permettent à l’artillerie de balayer plus largement le glacis*. Lors de l’édification des fortifications post-médiévales, on a érigé des sortes de casemates (abris plus ou moins enterrés destinés à loger des hommes en armes ou à accueillir des munitions) appelées caponnières. A l’instar des bastions, elles flanquent la muraille et leurs embrasures* interdisent l’accès aux murailles.
Bec et gorge
Parmi les autres types de tours, mentionnons la tour à bec* qui présente une partie en saillie ou en pointe tournée vers l’attaquant (un ouvrage fortifié en angle saillant se nomme redan*) et la tour ouverte à la gorge*. Cette dernière n’est pas close sur la partie directement en communication avec l’intérieur du château. Ceci empêche l’ennemi qui a investi une partie de la place forte de s’y réfugier ou de s’y retrancher.
Donjon
Dans un château, la tour principale est évidemment le donjon*. La racine latine du mot est dominionis, la maison du maître (dominus). Etant en principe la plus élevée et la plus forte du château, elle sert de dernier réduit en cas d’attaque et de rupture des défenses avancées. Ce bâtiment peut être isolé à l’intérieur de la forteresse ou flanquer le rempart de celle-ci. Il peut être habitable en temps de guerre, voire servir d’habitation permanente. Dans ce cas, on nomme le donjon tour habitation* puisqu’il sert aussi de logis seigneurial* ou de palais*.
Parfois, le donjon n’est qu’un beffroi quasiment inhabitable. Il n’est alors que le symbole de la puissance seigneuriale, ultime refuge en cas d’investissement de la forteresse et tour d’observation complémentaire aux autres tours et aux diverses défenses. Dans le monde germanique, on emploie souvent, dans ce cas-là, le terme de Bergfried* (étymologiquement: »qui protège le château » ou Burg-Friede). A l’instar des autres tours, le donjon peut être carré, polygonal (généralement pentagonal ou octogonal) ou cylindrique.
La porte du donjon est quasiment toujours placée dans la partie supérieure de la tour et reliée au rempart ou au logis seigneurial par une passerelle escamotable.
Échauguette
Il existe aussi, en complément de toutes les constructions ayant une faiblesse stratégique ou défensive, quelques types de tourelles*. Ces petites tours sont maçonnées ou bâties en bois et en terre battue. Les tourelles peuvent être érigées en encorbellement* au sommet d’une muraille ou placées à l’angle d’une tour. Elle peuvent aussi être ornementales. La tourelle la plus courante est l’échauguette* ou poivrière* cylindrique. Cette guérite est généralement placée à l’angle extérieur d’un rempart ou d’une tour.
Pour se défendre : les fentes de tir
De nombreuses ouvertures sont pratiquées dans la muraille et dans les tours, ce sont les fentes de tir*. Les plus anciennes pratiquées dans la muraille* sont appelées meurtrières*. Mais les fentes de tir ont évolué à travers les époques et se sont adaptées aux armes à feu. Ainsi, les ouvertures de tir rectangulaires, ovoïdales ou circulaires pratiquées dans la muraille se nomment embrasures*. Celles-ci sont ébrasées vers l’extérieur et peuvent être équipées de décrochements répétés appelés redans* (ou redents).
Archères et arbalétrières
Parmi les meurtrières*, il a y tout d’abord l’archère* (ou archière). Très étroite et haute, elle est construite dans l’épaisseur de la muraille pour le tir à l’arc. Le trait (la flèche) ne peut être décoché que dans un plan vertical. Mais l’archère peut avoir une base horizontale, parfois évasée en forme d’étrier, pour augmenter la vue plongeante et faciliter le tir en direction des fondations des remparts*. Le défenseur conçoit çà et là un espace de part et d’autre de la fente sur le côté intérieur de la muraille. Ce renfoncement important est nommé archère à niche* et permet au desservant de s’abriter pour préparer son arme pendant que l’un de ses coéquipiers décharge la sienne.
Pour le tir à l’arbalète, on utilise une fente largement ébrasée vers l’intérieur, nommée arbalétrière*, qui permet le tir dans plusieurs directions. Lorsque l’archère ou l’arbalétrière est encore équipée d’une fente horizontale elle est qualifiée de cruciforme*, car elle prend alors la forme d’une croix.
Bretèche et assommoir
Pour compléter la défense au-dessus d’une porte ou d’un tronçon délicat de rempart, le constructeur pose une petite construction de charpente ou de maçonnerie en encorbellement contre le rempart, voire au sommet de la muraille. Cet élément défensif nommé bretèche* est généralement rectangulaire et permet de renforcer un front*, un saillant* ou une porte*. Il peut être équipé de mâchicoulis* et de meurtrières*.
On peut, en outre, trouver des ouvertures dans la voûte d’un couloir (le couvrement du passage entre la porte* et la herse*) ou placées en encorbellement* au-dessus d’une porte fortifiée. Il s’agit des assommoirs* qui permettent le jet vertical (tir fichant) de pierres ou d’autres projectiles pour interdire l’accès aux assaillants. Soulignons que le jet d’huile bouillante est de l’ordre du mythe et a été généré par des imaginations romantiques.
Bouches à feu
A l’avènement des armes à feu (au 14ème siècle), l’archère* est agrandie vers le bas pour permettre le tir à l’arme à feu. L’ouverture est adaptée à l’arme. Ainsi naissent l’arquebusière*, la couleuvrinière*.
Lorsque les châteaux ont été équipés de canons, on a créé des bouches à feu qui sont des ouvertures plus ou moins élaborées en fonction de la direction du tir, de sa portée et de la protection du desservant. Ces ouvertures, qu’on appelle canonnières*, peuvent être rectangulaires, ovoïdales, ou circulaires. Elles sont évasées vers l’extérieur et parfois équipées de redans*.
La montée du château
Pour accéder au château, et plus particulièrement à l’habitat du seigneur, le visiteur emprunte le chemin de défilement* constamment sous le contrôle des défenseurs. Voie principale, elle conduit de l’entrée castrale* extérieure la plus éloignée jusqu’à la porte d’entrée principale de la demeure seigneuriale.
Ponts-levis
Avant d’accéder à l’intérieur du château, l’arrivant doit généralement traverser le pont-levis* jeté au-dessus des douves* ou du fossé*. Ce tablier mobile horizontal en bois, pivotant autour d’un axe horizontal, peut être abaissé ou levé soit à l’aide d’une chaîne, soit à l’aide d’un ou de deux balanciers munis d’un contrepoids.
Parfois, le pont-levis est complété d’un pont dormant* en pierre, immobile et même noyable. Il est relié à la contrescarpe* et n’est pas escamotable, contrairement au pont-levis.
Porte et poterne
Lorsqu’il est le bienvenu, l’hôte passe ensuite par la porte* (ou grande porte) qui est l’entrée principale du château. Elle est généralement fortifiée et équipée de vantaux* en bois munis de clous. Elle peut être précédée d’un pont-levis* et équipée d’une herse*. Le passage couvert à proximité de la porte possède parfois un assommoir*.
On trouve quelquefois d’autres entrées plus discrètes : les poternes*, qui sont des accès secondaires étroits et bas.
Les poternes peuvent être dérobées ou cachées, et même donner dans le fossé* pour faciliter les évasions, les départs précipités, les rencontres secrètes. Une poterne peut aussi être accolée à la grande porte* et être réservée à la circulation piétonne. Dans ce cas, on emploie généralement l’expression de « guichet piétonnier » ou « passage piétonnier ». Plusieurs portes successives, plus ou moins élaborées, peuvent compliquer l’approche de l’ennemi.
Cours
Lors de la montée au château, le passant traverse plusieurs cours. D’abord les lices*, qui sont des terrains souvent protégés ou fortifiés situés à l’avant du château et où peuvent se dérouler les tournois, puis les bayles, bailes ou bailles*, qui sont de grandes avant-cours habitables, enfin, la basse cour* (ou cour basse), située en contrebas du château. Dans les grands châteaux forts, la basse cour est située entre le rempart* principal et le rempart extérieur. Elle peut accueillir les dépendances* et les communs* et même abriter les sujets d’une seigneurie en période de troubles.
Elle peut aussi servir aux tournois. Enfin arrive la cour d’honneur*, l’espace le plus noble du château. Elle est située devant l’habitation seigneuriale ou au pied du donjon* et est destinée à l’accueil des visiteurs de marque.
Puits et citernes
C’est souvent dans l’une ou l’autre de ces cours que se situe le puits*, endroit crucial pour l’approvisionnement en eau de source captée directement dans le sous-sol ou dans la nappe phréatique. Pour atteindre cette dernière, il faut, dans certains cas, creuser le rocher servant de socle au château. Le puits peut aussi se trouver à l’intérieur des bâtiments ou à l’extérieur de l’emprise du château. En complément au(x) puits, le châtelain prévoit l’une ou l’autre citerne*, cuve ou réservoir de récupération des eaux de ruissellement. Elle peut être creusée dans le roc ou maçonnée et peut aussi être jumelée avec un puisard* permettant de récupérer l’eau recueillie dans le puits ou la citerne.
Enfin, chez le seigneur
Le bâtiment qui loge le seigneur et sa famille se nomme logis seigneurial*. Ce dernier peut être une maison en bois ou en dur selon la richesse du maître de céans. Il est souvent protégé par le donjon* et même relié à lui par une échelle mobile ou une passerelle escamotable, appelée pont volant*, reliant les combles du logis seigneurial ou les remparts à la porte du donjon. Cette porte est presque toujours placée dans la partie supérieure de la tour.
Le seigneur peut aussi loger dans une tour* plus ou moins habitable, voire un palais* (ou palas*) plus ou moins luxueux. Plus l’occupant est élevé dans la pyramide féodale, plus son habitat aura des chances d’être somptueux. Mais tous les châteaux ne servent pas de résidence. Certaines forteresses n’ont qu’une fonction militaire, dont celle d’accueillir une garnison.
Les logis seigneuriaux possèdent souvent quelques commodités dont les latrines*, lieux d’aisance placés en encorbellement* à l’extérieur des murailles ou construits directement dans les murs de l’habitation avec évacuation sur l’extérieur, notamment dans les fossés*.
Fenêtres
Les salles du château possèdent plus ou moins d’ouvertures. Selon les époques de construction, les fenêtres des premiers châteaux sont tracées en plein cintre ou en arc brisé et séparées par des colonnettes ou des meneaux* qui se généraliseront à la Renaissance. Certaines fenêtres romanes ou gothiques possèdent un remplage* sculpté et ajouré. Il est courant de rencontrer des fenêtres géminées* (jumelées). Mais il est plus rare de trouver un oculus* (fenêtre ronde) dans l’architecture romane, gothique et Renaissance. A l’époque baroque, l’oculus devient œil de bœuf*.
Les différents étages sont reliés entre eux par des échelles chez les moins aisés ou des escaliers, souvent en colimaçon.
Communs et dépendances
Généralement, à proximité du logis seigneurial se trouvent les communs* constitués des habitations et des locaux de fonction attribués à la domesticité ou à la garnison. Il s’agit, entre autres, des logements, des cuisines où l’on reconnaît parfois la cheminée et l’évier*, des réserves, de l’écurie, de l’étable, de la bergerie, du moulin, de la forge, de la poterie, des greniers, de l’armurerie, des niches à chiens… On utilise parfois le terme de communs pour désigner l’ensemble des biens seigneuriaux. Les dépendances* sont souvent synonymes de communs. Quoiqu’il en soit, ce mot recouvre l’ensemble des bâtiments complémentaires nécessaires au bon fonctionnement du château.
La chapelle
Il n’y pas de château fort sans lieu de culte, oratoire ou chapelle*. Celle-ci, lorsqu’elle est conçue dans un château important, est un bâtiment isolé à l’intérieur du complexe castral* ou s’intégrant au logis seigneurial, voire au rempart*. Consacrée au culte divin et parfois réduite à un simple oratoire, la chapelle est dédiée à un ou plusieurs saints. dont le maître de céans aura, dans la mesure du possible, récupéré quelques reliques. Dans certains cas, la chapelle peut servir de lieu de pèlerinage et, donc, rapporter des subsides au châtelain. La chapelle -du latin cappa, qui signifie manteau- est ainsi nommée en raison du premier oratoire, au palais royal de Paris, qui avait recueilli le manteau de saint Martin de Tours.
Textes rédigés par Jean-Marie NICK Président Honoraire de l’Association des Châteaux Forts et Villes Fortifiées d’Alsace
Source ACF